« Je comprends pas… J’attire toujours le même genre de relation, alors que je veux autre chose. »
Cette phrase, je l’ai entendue des dizaines de fois en séance. Et si je devais résumer le nœud du problème en un mot, ce serait : croyances. Plus précisément : croyances profondes. Celles qui vivent en nous sans faire de bruit, mais orientent pourtant nos choix, comportements et réactions… même (et surtout) quand on pense « décider en conscience ».
Dans cet article, on va faire un petit plongeon lucide et concret dans le monde des croyances profondes – les fameux deep beliefs – pour comprendre comment elles conditionnent nos décisions, souvent nos déconvenues, et surtout comment elles peuvent être délogées.
Une croyance, ce n’est pas une pensée passagère
Commençons par distinguer une croyance d’une pensée. Penser « je suis nul·le » après un échec ponctuel, c’est une réaction émotionnelle. Croire depuis l’enfance que « je ne suis pas assez bon·ne pour réussir quoi que ce soit », et faire en sorte d’éviter toute prise de risque pour ne pas le confirmer… Ça, c’est une croyance profonde.
Une croyance profonde, c’est une perception du monde ou de soi qui s’est coulée dans notre système nerveux. Elle forme un filtre invisible à travers lequel tout passe : ce qu’on perçoit, ce qu’on anticipe, ce qu’on choisit (ou évite). En clair : elle écrit notre scénario sans nous demander notre avis.
Et le plus ironique dans tout ça ? Une partie de ces croyances profondes ne viennent même pas de nous : elles sont héritées de la famille, des premières expériences de vie, des normes sociales ou même, pour les plus sensibles d’entre nous, de mémoires transgénérationnelles.
Des croyances à l’œuvre dans les choix du quotidien
Je vous donne un exemple réel, anonymisé et un peu modifié :
Lors d’un accompagnement, L., 42 ans, m’explique qu’elle choisit systématiquement des partenaires indisponibles. Elle tombe sous le charme d’hommes « libres dans leur tête, mais pas vraiment dans leurs actes » (je traduis : mariés, débordés ou émotionnellement absents). Elle me dit : « Ce n’est pas ce que je veux ! Je veux une relation stable. » OK. Mais quand on gratte, une croyance profonde émerge : « Si je me rends totalement disponible, je serai rejetée. »
Sa stratégie inconsciente ? Se connecter uniquement à des hommes qui ne peuvent pas « vraiment » l’accueillir. Histoire de ne pas risquer la grande blessure du rejet. Autrement dit, sa croyance gouverne son choix… tout en prétendant le contraire.
Et c’est comme ça qu’on répète des schémas.
Comment les croyances s’impriment dans le corps
Ce point est essentiel. Une croyance profonde n’est pas seulement une idée : c’est une empreinte corporelle. Elle s’ancre dans le système nerveux, influence la respiration, met le corps en tension ou en vigilance, déclenche des réactions automatiques.
Les neurosciences le confirment : une croyance ancrée modifie la manière dont le cerveau filtre l’information. Par exemple, si vous croyez que « les hommes sont dangereux », vous verrez inconsciemment les preuves de cette croyance partout… même si elles ne sont pas objectives. C’est ce qu’on appelle un biais de confirmation. Et notre système nerveux, lui, reste en alerte rouge.
Ce n’est donc pas juste une question de mental. Pour déloger une croyance profonde, il faut passer par le corps, par la sensation, par le vécu.
Identifier ses propres deep beliefs
Alors, comment mettre à jour ce qui se trame dans l’ombre ? Voici une méthode simple, mais redoutablement efficace que j’utilise souvent en séance :
- Choisis un domaine de ta vie où tu te sens bloqué·e (relation, sexualité, travail, argent…).
- Observe le scénario répétitif qui revient toujours. Pas une exception, mais bien une histoire qui se répète.
- Note ce qui te vient spontanément à l’esprit quand tu penses à cette situation : peur, sentiment, mot-clé.
- Puis pose la question-clé : « Qu’est-ce que je devrais croire pour que ça m’arrive à chaque fois ? »
Exemple : « Si je ne reçois jamais de reconnaissance au travail, quelle croyance cela reflète-t-il ? » Peut-être : « Je dois prouver ma valeur pour être vue. »
Une fois la croyance identifiée, c’est comme avoir trouvé la griffe de la pieuvre. Il reste à la saisir pour ne plus se laisser entraîner dans les tentacules du schéma.
Pourquoi elles reviennent en force… même quand on les a « comprises »
On a beau avoir mis un mot dessus, regardé son passé, refait le puzzle de l’enfance… rien n’y fait. Le schéma revient. C’est « plus fort que soi ». Pourquoi ?
Parce qu’une croyance ne s’efface pas par l’intellect seul. Elle a besoin de sentir que des ressources nouvelles sont possibles. Et pour cela, il faut vivre, dans le corps, une autre expérience. Une expérience réparatrice. C’est là qu’interviennent les approches corporelles, émotionnelles ou énergétiques : elles permettent de reprogrammer le réflexe profond qui faisait croire qu’on devait toujours « faire avec » une réalité limitante.
Les croyances profondes autour de la sexualité
Dans le champ que j’explore au quotidien – la sexualité consciente –, ces croyances profondes sont omniprésentes, souvent silencieuses, et très actives :
- « Mon plaisir passe après. »
- « Il faut donner pour mériter l’amour. »
- « Le sexe, c’est salissant, voire dangereux. »
- « Si je montre trop de désir, je serai jugé·e. »
Ces phrases, on ne se les dit pas forcément de façon consciente. Mais elles influencent radicalement notre manière d’entrer en lien, d’oser exprimer nos besoins, d’accueillir le plaisir. En les repérant et en les traversant, on ouvre l’espace d’une sexualité plus libre… mais aussi plus vraie et plus reliée à soi.
Remplacer une croyance ne suffit pas : il faut la transformer
Une erreur que je vois souvent : vouloir « remplacer » une croyance par une affirmation positive. Par exemple : « Je ne vaux rien » → « Je suis une personne merveilleuse ». C’est joli sur le papier, mais si le système ne le croit pas profondément, ça sonne creux. On entre dans une forme de dissonance qui, parfois, crée encore plus de mal-être.
Transformer une croyance, c’est avant tout permettre au corps d’expérimenter que quelque chose d’autre est possible. Voici quelques leviers puissants pour ça :
- La thérapie somatique : elle aide à libérer les tensions associées à la croyance.
- Le travail énergétique : efficace pour déprogrammer des mémoires cellulaires ou karmiques.
- Les mises en situation (en séance ou atelier) : elles permettent de vivre une nouvelle réponse émotionnelle.
- Les pratiques de pleine conscience et d’auto-observation : précieuses pour repérer les moments où la croyance tente de reprendre le contrôle.
Autrement dit : il ne s’agit pas juste de penser autrement, mais de vivre autrement.
Et maintenant ?
Si tu es resté·e jusqu’ici, c’est sans doute que quelque chose a vibré à la lecture de ces lignes. Peut-être que des croyances commencent à se dévoiler. Peut-être que tu sens que certaines ne te servent plus, voire t’étouffent.
La bonne nouvelle, c’est que rien n’est figé : nos croyances ne sont pas nous. Elles sont des programmes passés, adaptatifs à un moment donné, mais qui peuvent être transformés. À condition qu’on ose aller voir, nommer et déconstruire ce qui semblait « normal », « logique » ou « évident ».
Et si, à la place de répéter les choix dictés par nos deep beliefs, on commençait à construire une réalité à la hauteur de qui l’on devient ?
Tout équilibre se crée pas à pas. Et souvent, le premier pas, c’est justement celui de la lucidité.
Tu veux aller plus loin dans cette démarche ? Prends un instant pour identifier un domaine de ta vie où tu es insatisfait·e. Demande-toi : quelle croyance se rejoue ici ? Et quelle autre expérience j’ai besoin de vivre pour m’en libérer ?
C’est un chemin d’exploration. Ni linéaire, ni parfait. Mais clairement libérateur.